1re lecture : Genèse 2, 7-9 ; 3, 1-7a Psaume 50 2e lecture : Romains 5, 12-19 Évangile : Matthieu 4, 1-11 |
1. Comme il est important chers amis que chaque dimanche soit l’occasion, par la méditation de la Parole de Dieu en particulier, de revenir à Jésus-Christ ! De se laisser étonner par ce qu’il dit, par ce qu’il fait… De ne jamais être blasé par ces textes même et surtout s’ils reviennent régulièrement à notre écoute et notre méditation ! En ce début de carême, re-tissons des liens et même affermissons nos liens avec Lui, car il est le socle inébranlable de notre foi. Pas de vie chrétienne digne de ce nom, si nous n’avons pas une relation forte avec lui !
2. L’Évangile d’aujourd’hui est vraiment étonnant : une histoire de désert, de diable – selon l’étymologie du mot en grec, celui qui divise – le Tentateur personnifié aujourd’hui par sa parole trompeuse, par les tentations. Cela peut nous paraître très abstrait, mais en fait le diable attaque Jésus frontalement, là où nous imaginons que ça pourrait faire mal :
Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains.
Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas.
Ces deux tentations, ainsi que la troisième où le diable fait miroiter tous les royaumes du monde aux pieds de Jésus, tournent toutes autour de la notion de pouvoir et de puissance.
3. Ce fut la tentation de Jésus, et nous voyons bien dans l’Évangile comment, à chaque fois, il utilise les miracles qu’il opère, et qui le rendent si célèbre, avec beaucoup de circonspection : Surtout ne va pas le dire, dit-il souvent à ceux qui sont guéris ; ou bien il se retire dans la montagne quand on veut le faire roi. Voyez le défaut de notre époque qui veut absolument mettre immédiatement sur un piédestal celui ou celle qui par grâce de Dieu souvent, suscite l’admiration de tous, jusqu’à nous aveugler fortement, et voyez les excès extraordinaires qui peuvent être commis par suite de cette renommée soudaine, excès qui continuent à impacter fortement notre Église et la société en général, et dont nous avons du mal à nous relever.
4. A partir de cette réflexion, arrêtons-nous un moment grâce à la Parole de Dieu d’aujourd’hui sur deux points particuliers :
- comme il est actuel cet Évangile ! Comme il s’agit de tentations non pas sorties des sables et aussitôt oubliées, mais bien celles que nous expérimentons, chaque jour, en nous et autour de nous ! Tentation, désir de pouvoir, de puissance, et même de puissance immédiate, qui va écraser l’autre par sa force quasi-magique ! Comme il est à l’œuvre, le diable, aujourd’hui, sans se faire voir, sans se faire reconnaître !
- le 2ème point est un peu plus accessoire, encore que ! Tout d’un coup, grâce à cet évangile, nous découvrons mieux l’humanité de Jésus : il a été tenté ! Il a imaginé pour le succès de sa mission bien sûr, mais aussi pour plus de facilité pour sa mission, des miracles, dont on sait qu’il n’aurait pas eu de difficulté à les accomplir, pour convertir le monde, pour le conduire à lui. Disons qu’il en a « caressé » la possibilité, il a été tenté par cela.
5. Cet évangile est certainement capital car il permet de mieux apprécier à sa juste valeur qui est Jésus, son humanité dans le combat intérieur qui a été le sien, dans une plus grande fidélité à sa mission et à son Père. Après cet évangile, nous apprécions mieux son extraordinaire humilité, sa belle simplicité, sa proximité auprès de tous, en particulier les humiliés, les rejetés, les pauvres. Lui qui aurait pu changer les pierres en pain, qui aurait pu se jeter du haut du Temple, et les anges l’auraient porté, est allé au bout du bout du don de lui-même, en se laissant condamner par les méchants, et en mourant sur la croix, comme un rejeté, un hors-la-loi, un exclu, tout le contraire d’une vedette extraordinaire.
6. Au début de ce carême, notre attitude est celle de l’humble repentance comme nous y invitent la 1ère lecture et le psaume. L’attitude de l’homme et de la femme contraste absolument avec celle adoptée par Jésus, et ils se laissent berner par la parole du tentateur qui leur dit : Vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux ! En effet, leurs yeux s’ouvrent, et ils découvrent qu’ils sont nus ! Nus par leur ignorance, nus par leur désolante naïveté, nus par leur impuissance. Leur tentation de puissance et de pouvoir a été balayée, rayée, et ils ont récolté épreuves et larmes !
7. Et si donc, comme chaque année, nous entrons dans le carême, c’est pour opérer en nous une salutaire conversion. Ne l’oublions pas !
Nous sommes invités à revenir au réel de notre condition de fils et fille de Dieu. Nous sommes invités, poussés par l’Esprit à aller au désert avec lui. Il est avec nous dans le combat spirituel de nos vies, car Jésus a connu la tentation comme nous. Nous ne pouvons pas être vainqueurs de Satan, devenir ce que nous sommes, sans Lui. Selon sa parole : l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu, nous pourrons alors résister à tout ce qui nous fait donner la priorité à tout autre chose que la Parole qui donne la Vie.
8. Au début de ce carême, allons-nous écouter sa Parole, en allant au désert avec lui, nous aussi, poussés par l’Esprit, comme nous l’avons chanté ? Invités à nous arrêter de courir, d’être pris dans le tourbillon sans fin de nos activités, de prendre du temps pour prier, donc de jeûner de ce qui encombre nos vies ? Invités à prendre un peu d’espace pour lui / avec Lui et en Lui, pour réentendre l’essentiel, sa promesse d’être avec nous tous les jours pour porter nos croix avec nous. C’est ce que nous lui demandons ce matin pour ces 40 jours. Amen.
P. Loïc Gicquel des Touches