1re lecture : Joël 2, 12-18 Psaume 50 2e lecture : Corinthiens 5, 20 - 6, 2 Évangile : Matthieu 6, 1-6 ; 16-18 |
1. Le Carême, le mot lui-même, veut dire la Quarantaine, 40 jours qui nous séparent de Pâques. Mais nous ne doutions pas, il y a encore 3 semaines, combien ce mot de Quarantaine deviendrait célèbre, serait dit et répété avec la mise en Quarantaine de milliers de personnes que nécessite la diffusion du fameux Coronavirus en Chine d’abord, puis au Japon et maintenant beaucoup plus près de nous, en Italie, et parfois même sur un bateau de croisière, toutes ces populations qui par milliers, sont mises en quarantaine. C’est-à-dire sont mises à l’écart. L’expression bien sûr remonte à la bible elle-même, et à l’Évangile que nous lirons dimanche prochain : Jésus se retire au désert pendant 40 jours, Jésus se met en Quarantaine, Jésus entre en carême. C’est là où nous découvrons (entre parenthèses), que nous le voulions ou non, combien notre quotidien, par les mots employés, est enraciné dans notre patrimoine culturel biblique.
2. Le carême, c’est cela : entrer en quarantaine. C’est impressionnant : tous les chrétiens du monde sont invités à entrer dans cette quarantaine. Une quarantaine j’espère moins angoissante que celle provoquée par un virus ! Nous sommes invités à nous retirer, à nous retirer du monde, celui qui s’agite, celui qui est souvent futile, celui qui nuit à notre équilibre. Comme pour le coronavirus, c’est une question vitale, de vie ou de mort : il s’agit de nous protéger du virus mortel qui s’appelle l’égoïsme ; pour nous laisser guérir progressivement par le goutte à goutte de l’amour que Dieu a pour chacun de ses enfants et qu’il nous prodigue généreusement par les sacrements, en particulier celui de la réconciliation que nous sommes invités à recevoir pendant la Quarantaine.
3. Une quarantaine, cela sert parfois à cela : parce que nous avons le temps et l’espace pour cela, parce que les bruits du monde nous parviennent assourdis, nous poser les vraies questions de notre engagement dans la vie : où cela me mène-t-il ? Ne suis-je pas trop désordonné ? Quel ordre, quel but à tout cela ? En pensant à la parabole, sur quoi ai-je bâti ma maison ? Roc ou sable ?
4. Si vous aimez quelqu’un, vous aurez envie d’avoir avec cette personne des temps vrais de partage, de rencontre. Et vous en prendrez les moyens : telle soirée, telle sortie, telle activité seront barrées de mon agenda au profit de la personne aimée. Vous vous recentrerez sur elle, et plus rien d’autre ne comptera.
Il en va de même je crois avec le Carême. Nous prendrons du temps pour être avec le Seigneur, nous nous recentrerons sur lui, nous reviendrons à la source de notre baptême. Nous écouterons à frais nouveaux cette célèbre parole du prophète Osée qui fait dire ainsi au Seigneur : Mon épouse infidèle, je vais la séduire, je vais l’entraîner jusqu’au désert, et je lui parlerai cœur à cœur. « Laissons-nous donc conduire comme Israël dans le désert, afin que nous puissions enfin entendre la voix de notre Époux, pour la faire résonner en nous avec plus de profondeur et de disponibilité. » (Pape François).
5. « Laissez-vous réconcilier avec Dieu ». C’est à ce message que nous sommes ainsi appelés, à la suite du pape François et de son message de Carême. Si la mise en quarantaine évoque une salutaire fermeture sur l’extérieur, qu’à l’intérieur de nous-mêmes au contraire nous laissions alors le Christ pénétrer en liberté au plus profond de notre cœur.
6. Nous entrerons dans cette quarantaine avec excessivement de modestie, et non pas en conquérant. Les fautes commises au sein même de l’Église ces temps derniers nous invitent suffisamment à cette humilité, lorsque nous voyons avec effroi que ceux que nous pourrions croire les plus forts d’entre nous, véritables icônes de la charité ou de la sainteté, sont tombées dans un terrible fracas. L’imposition des cendres qui va suivre nous le rappelle : Souviens-toi que tu es poussière ! Souviens-toi tout au long de cette quarantaine que toi aussi tu es faillible, limité, pécheur. Que le virus peut sournoisement te guetter et t’emporter. Et avec les armes du jeûne, de la prière et du partage joyeux, libre, spontané, tu seras vainqueur avec le Christ. Amen !
P. Loïc Gicquel des Touches